GENOVA PER NOI | Camogli

Je prends le train pour Camogli, commune de la Province de Gênes et village de pêcheurs aux façades ocre, vertes, rouges. La bandiera flotte et les premiers baigneurs aussi. Il n’y a pas d’heure pour exposer ses chairs. Je me mets à l’ombre pour mieux supporter le petit paquet de papier suintant qui me brûle les doigts, j’ai acheté mon lunch à la focacceria du coin droit derrière une californienne qui racontait son arbre généalogique italo-américain à la vendeuse. « Si, mangiare is very buono in Italy », elle essaye mais ça jase dès qu’elle tourne les talons. Quand on est transalpin, on est fier et à quoi bon aller à l’autre bout du monde pour bouffer de la merde quand on peut rester dans sa province et sortir du four des gloires matelassées aux cèpes, patates et persil.

Giorgio, Alessandro et Monica s’asseyent près de moi et insistent pour me sortir de mon bloc-notes, ils me posent des questions sur la Suisse et ses coutumes, est-ce vrai que la consommation de cannabis est légalisée et sa plantation autorisée ? Ils m’exposent la frustration de payer des taxes qui partent dans les poches de Silvio et la catastrophe des chemins de fer étatisés. Mais finalement, ils admettent qu’il est dur de garder les trains en bon état quand des centaines de « tifosi » les prennent d’assaut après le match. Peut-être que le football est aussi à blâmer en fait mais tant pis, c’est ce qui a de plus beau au monde. Ce sont des adolescents. Ils me prouvent qu’ils ne s’y connaissent pas moins pour autant aux choses primordiales de l’existence en me refilant la recette des lasagne au pesto. On m’explique que la pasta de couleur, c’est « una cazzata », une invention, que seules les pâtes blanches sont vraiment italiennes : « farina, acqua e basta ». Le plus gras d’entre eux, dont les fesses sortent du maillot de bain, me recommande de ramener du sanglier et on se dit au revoir, une poignée de main pour les garçons comme pour les filles, il faut dire que la drague ne commence qu’à 18h lors de la passeggiata.

Je n’ai toujours pas fait le plein de farinata, sorte de galette à base de farine de pois chiches. La base. Tant pis, je reviendrai.

Je prends un Martini Blanc en terrasse avec les aventures d’Anthony Bourdain comme seules amies. A l’intérieur du café, un vieux renard raconte sa vie au barman qui a juste envie de rentrer chez lui. On met les chaises sur les tables, ils vont fermer et mon train part très tôt demain.

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