Dans l’idée de retrouver les dards ardents du sud et ramener des kilos de tapenade, je suis partie à Marseille.
Il y a certes des crottes de chien à chaque encoignure mais la cité phocéenne n’est guère sale ou glauque ou bruyante comme disent les mauvaises langues. Et les gens ont cet accent chantant qui vous donnent envie de tous les inviter pour l’apéritif.
J’aurais pu y rester cent ans.
Nous n’avons pas attendu plus de quelques heures sur place avant d’attaquer les panisses, préparation à base d’eau, de farine et de pois chiches, qui se présente en général sous forme de rouleaux de 20 cm de long par 7 cm de diamètre, qu’on découpe en tranches et qu’on fait frire. Dans une baraque sur le port de l’Estaque, on les achète à la douzaine et on les consomme avec les doigts alors qu’ils grésillent encore dans leurs cornets de papier. Non loin de Cézanne et des souvenirs post-impressionnistes, nous nous perdons entre les déclinaisons vertes, rouges et mauresques du Pastis. Sinon, nous prendrons juste une Cagole, la bière du cabanon à servir glacée.
Les jours se suivent et ne se ressemblent pas.
Une visite à Notre-Dame-de-la-Garde, un mistral soudain intense, des senteurs de thym, des darnes de lotte à la criée, mille savons aux arêtes irrégulières qui font éternuer, laissent les phalanges graisseuses et le coeur béat. Du sorbet au concombre, des petits vieux qui s’embrassent sous les jambages forgés d’une marquise et les poteries coulantes d’émaux à 5 Euros, les turritelles de béton brut à la Cité Radieuse, ce sable un peu grossier, la vue sur les îles du Frioul, les santons, des ouvriers qui jouent à la pétanque pendant leur pause de midi, la lavande, des huiles d’olive de Nice, de Nyons, d’Aix-en-provence mais aussi de noix, de noisettes, d’amandes et des huiles d’argan marocaines aux mille vertus cosmétiques. Du sirop d’hibiscus, de violette, de melon et les mâts des bateaux qui claquent.
Joli! J’ai l’impression d’y être, et ces panisses, quelle merveille!